Trois mille cinq cents ans avant notre
ère, dans le sud de l’Ukraine, a lieu la première
domestication du cheval. Presque trois millénaires après celle du bœuf, du
mouton et du porc, et près de six millénaire après celle du chien : le
cheval a longtemps résisté à l’homme.
De la chasse à la domestication, un long processus : |
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Recherché pour sa viande durant tout le
paléolithique, le cheval est peu à peu devenu, au néolithique, l’objet
d’une chasse sélective, limitée à certains individus – technique
qui contenait déjà des principes d’élimination des animaux défectueux, des
juments trop âgées, des étalons superflus pour la reproduction. Ø
Mais la domestication n’était pas acquise pour autant. Par
domestication, il faut entendre l’action que l’homme exerce en permanence
sur les animaux qu’il possède, ne serait-ce qu’en les élevant. Cette
action humaine peut s’exercer dans trois domaines : ü La protection : en le
protégeant, il le garde ; ü L’alimentation : en le nourrissant, il l’apprivoise ; ü La reproduction : en le reproduisant, il le
sélectionne, le croise, le modifie. Ø
La domestication ultime est atteinte lorsque ces
trois besoins vitaux des chevaux ne peuvent être satisfaits sans
l’intervention de l’Homme. Ce dernier prend alors le pouvoir sur l’animal. |
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Une
domestication sélective : le cheval et l’âne, mais pas le zèbre ou
l’hémione : |
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Le succès de telle ou telle domestication dépend
de la rencontre des qualités intrinsèques des animaux, de leurs besoins, et
surtout de la volonté de l’homme. ü La domestication du cheval et celle de l’âne furent d’immenses
succès universels. Cela tient en grande partie au fait que ces
deux espèces se complètent très bien et permettent d’obtenir une large gamme
de services (attelage lord ou léger, équitation, portage, dépiquage...).
Cette complémentarité a encore été
améliorée, dès l’Antiquité, par la production du mulet, dont l’utilité est
multiple. Le bardot ü La
domestication des hémiones est attestée dans l’Orient Antique, mais de façon
sporadique. Celle du zèbre, dont témoignent certains attelages du XIXème
siècle, ne dépassa jamais les bornes de la simple curiosité. Sans doute trop
rapides, nombres d’expériences de domestication tardive se soldèrent en effet
par des échecs et accréditèrent la réputation d’irrémédiable indocilité
des zèbres et des hémiones. |
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Une domestication tardive : le lent rapprochement du
cheval et de l’homme : |
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Les premiers signes incontestables de
domestication du cheval, c’est-à-dire de modifications morphologiques, de traces
décelables sur les ossements, de présence de mors... ont été mis en
évidence, dans le sud de l’Ukraine, sur le site de Dereivka, et
datés d’environ trois mille cinq cents ans avant notre ère. Domestication
donc tardive comparée à celle d’autres
espèces animales, mais dont l’extension a ensuite été fulgurante, atteignant
l’Europe de l’Ouest au cours de l’âge du bronze (IIème millénaire avant notre
ère). Ø
Cette domestication trouve son origine dans la
conjonction d’une série de facteurs. ü Les premiers tiennent à l’animal lui-même.
Naturellement méfiant et prompt à s’enfuir à l’approche de tout danger présumé,
le cheval présente aussi certains caractères comportementaux qui ont favorisé
sa domestication. C’est un curieux et un gourmand incorrigible : il
finit presque toujours par se laisser approcher, avec de la patience, du
temps, de l’ingéniosité et quelques friandises... c’est un animal grégaire,
qui vit en groupe sous la conduite d’un étalon : une fois abolie la
distance de fuite, il admet l’homme. ü Les motivations des hommes combinent des considérations
économiques, psychologiques et religieuses Economiques,
comme le besoin de disposer en permanence de réserves de viande sur pied
immédiatement disponibles, même si les premiers domesticateurs du cheval
connaissaient déjà l’élevage d’autres animaux et ne devaient certainement pas
compter sur cette ultime conquête pour subsister. Psychologiques,
comme le désir de s’approprier ce gibier rapide et puissant, incarnant des
vertus guerrières alors très valorisées. Religieuses,
comme l’indique la fréquence des chevaux dans les sépultures eurasiatiques
qui furent longtemps associés au culte des morts (Dereivka, Pazyryk dans
l’Altaï, Banpo et Qufu en Chine). |
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Réinventer la domestication : les indiens et les chevaux
« marrons » : |
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Au début du XVIème siècle, les Amérindiens, d’abord saisis
d’épouvante à la vue de ces animaux gigantesques et fougueux apportés par les
Espagnols, ne tardèrent pas à comprendre les avantages qu’ils
pourraient eux aussi tirer des chevaux. ü Les
Indiens du Chaco ou les Chichimèques du Mexique commencent par chasser les
chevaux « marrons » (ensauvagés) pour le cuir et la viande. ü Puis
ils osent l’équitation par imitation comme les curacas péruviens
(anciens chefs incas), et par résistance, pour faire la guerre aux Espagnols,
comme les Araucans du Chili ou les Indiens de Patagonie, qui transformèrent
les prairies argentines en un immense Far West. ü Enfin,
les Indiens des plaines de l’Amérique du Nord transposèrent au cheval
leurs techniques d’élevage et de transport par travois, réservées
jusque-là aux chiens, le seul animal domestique précolombien.
L’usage du cheval se répand en
Amérique du Nord comme une traînée de poudre. Dès 1650, les cavaliers
apaches sont parmi les premiers à galoper dans les espaces du Nouveau-Mexique. Ø
Les Indiens des Plaines, sans le modèle espagnol,
durent tout réinventer pour domestiquer
les chevaux redevenus sauvages. En revanche, ceux d’Amérique du Sud,
proches des colonisateurs, empruntèrent le cheval avec son « mode
d’emploi ». Ø
Les témoignages d’époque sur les techniques
d’élevage et d’utilisation du cheval chez les Indiens d’Amérique du Nord
montrent une grande diversité : certains soulignent la douceur et la patience dont les
Indiens font preuve avec leurs chevaux, admirent les prouesses des cavaliers
et la docilité des chevaux ; tandis que d’autres dénoncent leur
brutalité et leur négligence ; d’autres enfin pensent que si les Indiens
dressent si peu leurs chevaux, c’est pour les rendre plus difficiles à
voler... |